Un utilisateur d’une vénérable voiture Peugeot (finition luxueuse de type 16ème) passe chaque matin sur un passage piéton d’une petite ville huppée où les cyclistes sont aussi nombreux que les touristes place de l’étoile en Aout.
Le passage est (bien) gardé par un préposé de la gendarmerie nationale dont le zèle n’a d’égal que sa perspicacité.
Sur le passage, au moment où les piétons esquissent un pas ou s’engagent, le rituel est le suivant :
1/ Avec des gestes lents et majestueux (tel ceux d’un albatros), le militaire assermenté aux gants blancs interrompt la circulation d’un geste impérieux.
2/ Il fait des mouvements circulaires avec ses bras : le piéton peut traverser sereinement. En même temps, il sourit aux femmes et aux enfants qui traversent. Mais il reste vigilant et garde un œil
sévère (mais juste) aux automobilistes qui doivent attendre.
3/ Quand le passage piéton est libéré, il se fend d’une chorégraphie (toujours la même) : une main devant, une main derrière et un petit 1/4 de tour sur les talons. C’est le signe qui signale aux automobilistes qu’ils peuvent reprendre la route. Parfois si l’automobiliste a été un peu impétueux ou peu prompt à s’arrêter,il jette un petit regard noir qui veux dire : “que je ne te vois plus”.
Ce jour là, l’utilisateur de la dite Peugeot était aux premières loges devant le passage piéton. Phase 1, 2 et 3 sans encombres mais au moment de repartir le flic fronce le sourcil en regardant les phares de la (jadis) splendide voiture.
Sans pour autant me liquéfier, il a senti un frisson le parcourir. En langage gestes sans paroles, le militaire de la gendarmerie signifiait quelque chose comme ça :
– “Msieur, vot ampoule gauche de type L8 n’est pas conforme au code de la route R105, veuillez la remplacer au plus tôt sinon je verbalise au prochain passage”.
Le WE, avec méthode, l’utilisateur achète un kit de rechange, ouvre la notice d’utilisation et s’empresse de changer la dite lampe.
Rien de plus simple : ouvrir le capot, soulever le cache, paumer les vis, se coincer la main dans le moteur, paumer un tournevis, mettre du gras sur la notice, tenir la lampe du bout des doigts, prendre un coup de jus et changer la lampe.
Flambard avec l’ampoule neuve, il repart avec le bon œil mais la semaine suivante, c’est l’ampoule droite qui rend l’âme. Et manque de pot, il est arrêté sur le fameux passage piéton.
Ce serait vraiment du grand art si le gendarme se souvenait exactement du coté de la lampe défectueuse.
Non, à la place un nouveau :
– “Msieur, vo’t ampoule droite de type L8 n’est pas conforme au code de la route R105, veuillez la remplacer au plus tôt sinon je verbalise”.
Et dire qu’on est en février …. D’ici 2 mois plus besoin de mettre les phares le matin.